Hollande “social-démocrate” ? Plutôt néolibéral-autoritaire !

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Les débats vont bon train sur le prétendu tournant du gouvernement Hollande : “social-libéral” (selon la formule qu’a reprise l’éditorial de l’Humanité Dimanche) ou “social-démocrate” selon le président lui-même. Un tournant, vraiment  ? Plutôt une nouvelle escalade. Et puis qui ne voit que la politique du gouvernement PS-EELV n’est ni “sociale” (encore moins écologiste !), ni “démocrate” (aucun débat démocratique, une assemblée godillot, un simulacre de “dialogue social” qui tourne à l’entourloupe permanente), ni même “libérale” au sens de l’économie classique ? Il s’agit clairement d’une politique néolibérale où, de façon autoritaire, l’État intervient dans l’économie en organisant la réduction des salaires, en insufflant de l’argent public dans les entreprises capitalistes, en réduisant à néant tous les services publics.

Par conséquent, il faut ne pas avoir été très lucide sur les 20 premiers mois du gouvernement Hollande-Ayrault pour voir dans les annonces des vœux présidentiels, puis dans sa conférence de presse de mardi, un réel “tournant”.

C’est une « accélération » selon le ministre du Travail Sapin lui-même. C’est effectivement une nouvelle escalade, dans la continuité exponentielle des attaques contre les travailleurs et la population menées sous Sarkozy et par le gouvernement actuel depuis 2012. S’il y a “tournant” c’est au sens où il n’est plus possible à Hollande de continuer le jeu des faux-semblants ou de la méthode Coué sur l’inversion de la courbe du chômage.

Gauche droite  ?

Il faut citer F. Hollande pour comprendre, d’une part, que le discours n’a rien de nouveau, d’autre part en quoi la politique du gouvernement PS-EELV vise, par la contrainte budgétaire, à une “thérapie de choc” à la manière de la fameuse “école [néolibérale] de Chicago” de Milton Friedman [1] : « Nous devons faire des économies partout où ce sera possible. C’est vrai pour l’État, pour les collectivités locales… et pour la Sécurité sociale, qui doit en terminer avec les excès et les abus ». La diatribe populiste contre les prétendus « excès » et « abus  », en accompagnement du « pacte de responsabilité » auquel Hollande a invité les patrons, est toutefois plus originale dans la bouche d’un dirigeant censé être de la gauche “démocratique”. Suivie de l’encouragement aux ministres à gouverner par décret et ordonnance, elle traduit une réelle accélération de la dérive autoritaire du pouvoir. Le ministre des expulsions M. Valls n’est décidément pas un loup solitaire dans ce gouvernement...

Pierre Gattaz s’en est aussitôt réjoui, se déclarant « prêt à jouer le jeu » (ce jeu truqué qui lui rapporte à tous les coups) en rappelant sa proposition formulée mi-novembre d’un « pacte de confiance, signé par plus de 80 fédérations professionnelles et 120 Medef territoriaux ». C’est aussi la copie conforme de ce que propose l’UMP, qui n’a pu qu’approuver l’annonce de Hollande. Woerth s’est ainsi félicité  : « C’est notre politique  ! Cela correspond au programme de Nicolas Sarkozy.  » Chiche ont-ils dit, sauf Copé qui fait toujours semblant de croire que Hollande est “de gauche” !

Et c’est bien sûr dans la même optique que François Hollande est allé à Toulouse pour vanter son projet sur la “simplification” de la vie des entreprises, qui viserait 1 à 2 milliards d’économies d’ici à deux ans. Des économies dont certaines seraient réalisées par la suppression d’une partie des 150 taxes “pesant” sur les entreprises.

L’ami de patrons, notre adversaire

Hollande est bien dans la continuité de l’ANI, de la course à la compétitivité par la baisse du “coût du travail” (c’est à dire des salaires !). Il s’agit maintenant d’exonérer à terme le patronat du paiement de sa part des cotisations famille et maladie de la protection sociale. C’est bien une partie du salaire indirect qui serait ainsi offert aux patrons, un nouveau cadeau de 37,7 milliards d’euros pris sur les salaires. Gattaz en demande encore plus, un allègement des contributions patronales de 100 milliards d’euros, une ponction sur le salaire indirect qui serait compensé par l’impôt ou par une hausse de TVA que paieront les salariés. L’argument du « donnant-donnant » est un mensonge éhonté, un marché de dupes  : « moins de charges sur le travail, moins de contraintes sur les activités » en contrepartie de « plus d’embauches et plus de dialogue social ». Qui peut encore y croire  ?

Hollande justifie cette brusque accélération de son offensive contre les salariés en invoquant le fait que « la crise s’est révélée plus longue et plus profonde que nous l’avions nous-mêmes prévu ». Mais la “crise” ne tombe pas du ciel, elle est la logique de la politique des gouvernements qui se sont succédé et de leurs amis du grand patronat et de l’oligarchie financière. Cette nouvelle escalade ne fera que l’aggraver.

Se regrouper pour affronter ce gouvernement

D’une certaine façon, c’est vrai que Hollande et son gouvernement n’ont pas d’autre “choix” que d’accentuer les attaques contre les salariés et, en conséquence, il ne peut plus manier un bluff auquel plus personne ne croit. Il est contraint de dire plus crûment les choses.

Comment alors est-il encore possible de voir des syndicats comme la CFDT soutenir le “pacte” ? Comment est-il possible que les autres syndicats restent passifs et attentistes, comme s’ils n’avaient pas d’autre politique à opposer à celle des patrons et de Hollande  ? Comment continuer à prôner un simple “changement de cap” comme le fait le Front de gauche et en particulier le PCF ? [2]

Ce tournant dans la continuité de Hollande est une nouvelle démonstration de la nécessité de regrouper toutes les forces, les équipes militantes qui ont conscience qu’il n’y a pas d’autre issue que l’affrontement social pour imposer nos exigences, mettre fin à l’austérité et à la course à la compétitivité, c’est à dire au profit.

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17 janvier 2014, par NPA 49

[1] École de Chicago qui, rappelons-le, fit ses premiers “travaux pratiques” dans le Chili de Pinochet.

[2] PCF dont il faut reconnaître qu’il a besoin de “croire” à un PS qui serait tout de même “de gauche” dans la mesure où il s’allie avec lui dans nombre de communes, comme à Angers, dans le seul but d’avoir quelques “élus” potiches aux prochaines élections municipales. À ce propos, il est affligeant que le PCF de Trélazé ait finalement rompu avec le PS Marc Goua, non pas sur le programme, mais au seul motif que le maire sortant ne leur laissait pas assez de places éligibles...