Hausse des droits d’inscription à l’université : urgence d’une mobilisation massive

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L’intersyndicale CGT-FO-FSU-SUD-UNEF de l’université d’Angers a tenu mardi 11 décembre une conférence de presse pour marquer son opposition absolue à la mise en place par le gouvernement de droits d’inscription différenciés selon l’origine nationale des étudiant.e.s. Cette conférence a été suivie d’une réunion d’information à la faculté de Lettres qui a réuni 150 personnels et étudiant.e.s français et étrangers. Depuis, le ministère s’est lui-même trahi dans sa communication : ce n’est même pas pour « améliorer » les conditions d’accueil d’étudiant.e.s venu.e.s d’ailleurs que cette hausse intervient, mais pour permettre à l’État de ne pas verser aux établissements l’intégralité du budget qui leur est dû ! La hausse pour les étrangers est le prélude à une modification majeure du mode de financement des universités. Elle est bien le ballon d’essai d’une hausse généralisée des droits d’inscription. Il faut la bloquer !

Réunion du 11 décembre 2018 à Angers ---Réunion publique intersyndicale du 11 décembre 2018 à Angers--- [1]

Il y eut d’abord une lettre aux présidents et directeurs d’établissements de l’enseignement supérieur datée du 10 décembre et signée de la ministre F. Vidal. Écrit dans la novlangue cynique des néolibéraux, ce courrier cherchait à contenir le vent de révolte qui souffle jusque dans les conseils d’administration des universités. Jurant la main sur le cœur qu’il n’est pas question d’étendre la hausse à l’ensemble des étudiants, la ministre y instille pourtant l’argumentaire servi par ceux qui prônent cette hausse générale : la hausse des droits est censée abonder les « ressources propres » des établissements (argument déjà développé par le ministère dans un mail du 24 novembre ; cf. notre précédent article, « En finir avec la marchandisation de l’université »). De façon quelque peu hypocrite, F. Vidal fait remarquer aux présidents qu’ils peuvent exonérer de l’augmentation des droits les étudiants, s’ils le souhaitent. Mais bien sûr, cette exonération est à leur charge… Et elle reprend l’argument paradoxal déjà développé par le premier ministre E. Philippe : le pactole de la hausse est destiné à améliorer « l’accueil » des étudiants étrangers et même à augmenter le nombre de bourses (augmentation très relative : le gouvernement ne prévoit, au plus, que 4% de boursiers !)

Pourtant, dès le lendemain une autre lettre ministérielle [2] aux présidents et directeurs à propos du montant des budgets 2018 et 2019 de leurs établissements ramène le petit monde universitaire à une réalité plus brutale. Contrairement à ce qui avait été promis aux établissements, l’augmentation de la masse salariale correspondant à la progression de carrière de leurs personnels (inévitable dès lors que les recrutements de jeunes sont taris) [3] ne leur serait pas versée en 2019 et serait diminuée dès cette année ! Et le même courrier invite les établissements à « s’appuyer sur les ressources complémentaires issues de l’instauration de droits d’inscription différenciés pour les étudiants internationaux ». Bref, plus question du prétexte d’une amélioration des conditions d’accueil des étrangers. La hausse est bien l’amorce d’un changement majeur du mode de financement des universités. Et les dénégations de la ministre ne pourront pas occulter très longtemps qu’elle jette les bases du projet à long terme des néolibéraux à la manœuvre au gouvernement : abroger le droit à l’éducation à l’université pour le remplacer par un marché de l’éducation où l’étudiant.e devient « client.e » de petits commerces universitaires mis en concurrence, au prix d’un endettement (à vie ?) auprès des banques.

devant Campus France, 13/12/18 ---Manifestation contre la hausse le 13/12/18, devant Campus France---

C’est en tout cas ce qu’ont compris les étudiant.e.s dans plusieurs universités, notamment parisiennes. Ce jeudi 13 décembre, une manifestation de plusieurs centaines d’étudiant.e.s et personnels s’est terminée sous les fenêtres de Campus France, rue de la Grange aux Belles à Paris. La directrice de cet organisme gérant les échanges étudiants internationaux, qui a affiché illégalement la hausse des droits d’inscription sur son site, alors même qu’aucun arrêté officiel en ce sens n’a été signé, a refusé de recevoir une délégation. Mais la mobilisation ne fait que commencer. Le fait même que la plupart des présidents d’université se démarquent du ministère (ainsi, ce même jeudi 13 décembre, le conseil d’administration de l’université d’Angers a rejeté unanimement la hausse des droits d’inscription) est un signe palpable qu’elle peut triompher.

Non à la marchandisation de l’université !

Oui au service public d’éducation, laïque et gratuit, de la maternelle à l’université !

Voir également :
-  le communiqué national du NPA : #BienvenueEnFrance… mais pas trop (23/11/2018)
-  la tribune de Hugo Harari-Kermadec parue dans l’Humanité le 12 décembre 2018 et dans une version longue sur le site du Collectif Acides.

13 décembre 2018, par NPA 49

[1] Le Courrier de l’Ouest et Ouest-France ont publié des articles le 12 décembre sur la conférence de presse qui a précédé cette réunion. Voir également l’article de Angers-Info.

[2] Il s’agit d’une lettre « informative » de la DGESIP, direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle.

[3] Cette variation de la masse salariale est nommée « glissement vieillesse traitement » ou GVT dans le jargon de la fonction publique.