Municipales 2020 : crises majeures et abstention massive

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Ce pouvoir est irresponsable. Alors qu’il ferme à juste titre les établissements scolaires et de nombreux lieux publics pour tenter de répondre à la grave crise sanitaire du coronavirus, il a voulu maintenir coûte que coûte ces élections municipales dimanche 15 mars. Aussi, sans surprise, notamment à Angers, l’abstention a profondément marqué ce scrutin électoral, plus d’un électeur sur deux (54% en moyenne, 66% à Angers !) ne s’étant pas déplacé. C’est l’expression la plus claire du large désintérêt populaire pour cette élection perçue comme totalement déplacée dans une situation où l’ensemble du pays est en train de s’installer dans le confinement.

C’est aussi bien évidemment la continuité d’une crise démocratique qui marque l’ensemble des scrutins depuis plusieurs années, et qui s’exprime largement en dehors des urnes. Ainsi à Angers, plus des 2/3 des électeurs inscrits se sont-ils abstenus de voter pour les listes en lice. C. Béchu, le maire de droite sortant, recueille les voix de seulement 19,2% des 90.002 électeurs.

Cependant, dans la mesure où c’est dans les quartiers populaires que l’abstention a été la plus massive, dans la mesure où aucune liste crédible ne lui était opposée, la liste des droites obtient 57,82% des 29862 votes exprimés et 49 sièges. [1] Les listes du PS, du cartel EELV-Générations-PCF-Nouvel Élan et de l’alliance FI-GRS-Parti animaliste (ACP) obtiennent respectivement 16,81% (5 élu.e.s), 14,08% (4 élu.e.s), 5,12% (1 élue) des exprimés. Deux listes ne franchissent pas la barre des 5%, celle du RN (4,76%) et celle de Lutte ouvrière (1,40%).

Cela confirme malheureusement notre analyse de la situation locale, qui est d’ailleurs un bon reflet de la situation nationale. En l’absence d’une perspective politique unifiante (nationale et locale) portée par le mouvement social et écologiste, les listes se présentant comme “de gauche”, “vertes” ou “révolutionnaires”, ne pouvaient guère mobiliser l’électorat populaire. Les compromissions passées du PS ou le caractère bancal du cartel des Verts, du groupe de J-L Rotureau (qui avait appelé à voter Macron) et du PCF (qui proposa imprudemment, mais en connaissance de cause, deux candidats accusés de délits sexuels) l’expliquent suffisamment (surtout si on rapporte les voix obtenues au nombre des inscrits !). Les deux listes pour lesquelles nous avions appelé à voter (ACP et LO) ont fait encore pire, et d’autant plus qu’aucune ne portait une perspective écosocialiste clairement affirmée (ACP réussissant dans sa profession de foi à ne pas évoquer le gouvernement et la réforme des retraites ; LO -qui refusait toute alliance- ne prenant pas assez en compte la dimension écologique du combat de la classe ouvrière, pourtant évidente à l’heure du réchauffement climatique et... du Coronavirus).

Pour autant, la sanction du pouvoir, annoncée depuis plusieurs semaines, se confirme. L’opération Buzyn à Paris a pris l’eau, tout comme dans la grande majorité des principales villes du pays, avec en point d’orgue Lyon, jusqu’ici gérée par Collomb, ex-ministre de Macron, dont le candidat est très en difficulté à l’issue de ce premier tour. À Bordeaux, le candidat macroniste (12,69%) a même failli être dépassé par la liste NPA-FI conduite par Philippe Poutou (11,77%) ! Les raisons de cet échec, il ne faut pas les chercher bien loin. Depuis son arrivée au pouvoir, la politique libérale et autoritaire de Macron est rejetée par les classes populaires : du mouvement des Gilets jaunes sur les rond-points et dans la rue à la contre-réforme des retraites contestée par la grève, la mobilisation contre sa politique est incessante depuis un an et demi. La gestion de la grande crise sanitaire du Coronavirus par ce gouvernement, catastrophique, fait sans nul doute partie des nombreuses raisons de voter contre les macronistes qui pendant plusieurs semaines n’ont pas mesuré l’importance du danger et n’ont pris aucune mesure d’ampleur jusqu’à jeudi dernier.

Par cette irresponsabilité, le pouvoir amplifie aussi la crise politique en maintenant à tout prix ce premier tour des élections municipales… alors qu’à l’évidence, il sera certainement impossible de tenir le second tour. Cette crise politique n’est que le reflet d’une crise plus profonde d’un système capitaliste à bout de souffle, incapable aujourd’hui de répondre tant au risque d’un krach boursier qu’à la menace d’un dangereux virus… Les réponses aux crises - sanitaire, économique, démocratique... - que nous traversons, ce n’est pas dans les urnes que l’on peut les trouver mais dans la mobilisation de toutes et tous pour imposer des mesures d’urgence qui font passer nos vies avant leurs profits.

16 mars 2020, par NPA 49

[1] Rappelons que dans le scrutin municipal des grandes villes, la liste arrivée en tête obtient d’emblée la moitié+1/2 des sièges (ici, 30), la moitié-1/2 étant répartie à la proportionnelle de toutes les listes ayant obtenu plus de 5% (ici, 29 sièges).