Sculpteur de Septimanie “contre” Sculpteur angevin !

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Les militants du NPA de l’Hérault (voir leur site !) ont réussi un happening remarqué en inaugurant le 17 septembre devant l’hôtel d’agglomération de Montpellier une “statue” de “Septiman 1er”, alias Georges Frèche, maire et président d’agglo. Et ce, juste avant avant que ce politicien populiste n’inaugure à son tour les 5 premières des 10 statues des “grands hommes du XXe siècle” qu’il avait commandées au sculpteur angevin François Cacheux. Ce dernier avait donné la veille une longue interview au Courrier de l’Ouest. Analyse...

Les motivations des militants montpelliérains du NPA ont été clairement formulées. Par leur action festive, ils voulaient pointer les graves dérives populistes de l’ex militant maoïste et ex baron du PS Georges Frèche. En particulier :
-  le gaspillage de l’argent public pour les caprices d’un président cumulard (région et agglo). L’agglomération a voté la dépense (1,85 millions d’euros pour les 5 statues selon le sculpteur François Cacheux) alors qu’elle vient d’augmenter les tarifs des transports en commun (TAM)
-  la mégalomanie du Néron de Septimanie (“Septimanie” fut un nom de la région du Languedoc au début du Moyen-Âge ; G. Frèche a vainement tenté de le substituer à celui, officiel, de Languedoc-Roussillon) qui lui fait choisir des statues de 3 m. de haut dans la plus pure tradition du détestable « culte de la personnalité ».
-  un système institutionnel qui permet à certains élus d’empiler et de cumuler les mandats et ainsi de se comporter en véritable féodaux, hors de contrôle de la population
-  un mode de gouvernement clientéliste et autoritaire qui transforme la majorité des élus en courtisans du prince, élus qui n’imaginent même pas pouvoir émettre un soupçon de critique.

Les motivations des autres opposants à G. Frèche sont bien moins sociales et clairement de nature idéologique. De l’UMP aux Verts, seule la statue de Lénine semble poser un problème (à côté des quatre de Jaurès, Churchill, Gaulle, et Roosevelt), ainsi que peut-être le coût global, et pas le principe même de l’érection des statues que personne à part G. Frèche n’avait jamais demandé. Les Verts ont été jusqu’à promettre de déboulonner la seule statue du dirigeant bolchévique ! [1]

Derrière cette détestation de Lénine en particulier, filtre bien évidemment un anticommunisme bien traditionnel, sinon primaire. Dénué de toute réflexion historique, cet anticommunisme vise à présenter Lénine comme le responsable de la guerre civile de 1918-1921 et des crimes staliniens ultérieurs. G. Frèche ne s’est pas privé de rétorquer que, dans le tas, seul Jaurès n’avait pas de “sang sur les mains”. Déjà il prévoit cinq autres statues où son ancien dieu, Mao, trônera au milieu de Mandela, Nasser, Gandhi et Golda Meir...

Auteur des sculptures, l’angevin François Cacheux a donné le 16 septembre une longue interview au Courrier de l’Ouest, qui adopte une ligne de défense un peu différente. Pour lui, et c’est le titre de l’interview choisi par le Courrier de l’Ouest, “Lénine n’est pas un assassin”. Et de préciser “mais un philosophe”. Il signale en revanche qu’il a refusé de sculpter Staline (que G. Frèche envisageait donc de lui demander !), notamment à cause du rôle trouble joué par certains militants du PC, kapos au camp de Mathausen où lui-même avait été déporté. Même s’il n’approfondit pas, sa justification maladroite est moins dérisoire que celle de G. Frèche. Il y a bien une différence de nature entre d’une part l’action révolutionnaire -certes critiquable par maints aspects- de Lénine, confronté d’abord à la terrible guerre capitaliste de 1914-1918 (10 millions de morts, 20 millions d’invalides), puis à la guerre civile menée par les troupes blanches antisémites soutenues par les occidentaux, enfin aux conséquences dramatiques de ces conflits sur la situation économique et politique du pays, et d’autre part les agissements criminels d’un Staline surfant sur la corruption bureaucratique puis sur la terreur pour déclencher une véritable contre-révolution au sein du parti bolchevik avant de s’attaquer à la société toute entière au nom même du communisme qu’il dénaturait.

Mais, au delà du choix fréchiste des “grands hommes” (dont une seule femme !) du 20e siècle, il reste que ces statues ne sont là que par le caprice d’un despote régional, parmi les plus caricaturaux. Loin de devenir les oeuvres d’art voulues par François Cacheux, elles sont destinées à rester le dernier gadget auto-justificateur du Néron de Septimanie, sa statufication virtuelle. Et elle risquent bien de sombrer avec son règne, de même que les plusieurs millions d’euros mobilisés pour satisfaire son ego qui auraient pu être utilisés autrement...

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18 septembre 2010, par NPA 49

[1] Que ne sont-ils aussi vindicatifs à Angers pour obliger le maire à débaptiser la rue dédiée à Adolphe Thiers, le sanglant boucher de la Commune de Paris !