PSA : construire la riposte aux destructions patronales

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Le temps «  normal  » de l’industrie automobile européenne depuis 30 ans est celui des restructurations. Après les fermetures des usines de montage de Renault Vilvoorde, Opel Anvers, Fiat Termini Imerese, l’usine de PSA à Aulnay se trouve à son tour menacée de fermeture. Depuis plus d’un an, alors que les plans de PSA avaient été dévoilés par le syndicat CGT de l’usine, la direction patronale rusait en en différant l’annonce. Seul le ministre Montebourg s’interrogeait encore il y a peu sur la réalité de cette décision... Mais depuis hier, le couperet patronal est tombé : arrêt de la production à Aulnay en 2014 et suppression de 8.000 emplois en France.

Certains opposent le «  bon  » capitalisme industriel d’antan au capitalisme financier mondialisé d’aujourd’hui. PSA remet les pendules à l’heure  : l’actionnaire de référence du groupe est constitué depuis plus d’un siècle par la même famille, les Peugeot. Jusqu’à cet hiver 2012 elle avait refusé toute fusion avec plus gros. Renault satellisé par Nissan, ou Fiat recentrant son activité autour de Chrysler, ont fait des choix différents.

PSA s’est retrouvé en retard dans la voie de l’internationalisation, en comparaison, par exemple, avec Renault. En 2009, 73% de la production totale de Renault était réalisée hors de France, contre 62% pour PSA. Pour investir davantage dans les nouveaux pays de “conquête automobile”, les ressources nécessaires sont à trouver dans le profit réalisé grâce aux travailleurs des usines européennes. Jamais, en 2012, les firmes automobiles n’auront, dans le monde, produit et vendu autant de voitures. Tant pis pour le dérèglement du climat et tant mieux pour les profits  !

PSA a conclu une alliance avec General Motors en mars 2012. Arrivée de GM dans le capital de PSA, plans des bureaux d’études échangés, achats mis en commun, logistique partagée, et restructuration coordonnée des appareils de production en Europe  : cette alliance se fixe comme objectif encore plus de suppressions d’emplois et de fermetures d’usines. Autant être prévenus  ! Toutes les usines sont concernées. PSA Rennes est menacée par le déplacement de la production du véhicule successeur de la C5 à Opel Russelheim : plus d’un millier d’emplois doivent, selon PSA, y être supprimés. La fabrication des petits modèles fabriqués à Russelheim devrait être déplacée à Ellesmere Port en Grande-Bretagne ou Gliwice en Pologne. L’usine Opel de Bochum fermerait. La fabrication des moteurs à PSA Tremery pourrait être mise en concurrence avec Opel à Kaiserlautern. L’usine de boîte de vitesses de GM à Strasbourg est mise en vente.

Après plus d’un an d’enfumage, la direction de PSA n’a sans doute pas encore dévoilé tous ses plans. Pour préparer le terrain, PSA avait laissé fuiter dans la presse économique des informations sur l’état de ses finances justifiant des mesures encore plus violentes contre les salariés. Intox ou pas, il est sûr que c’est un chantage pour faire accepter encore plus de suppressions d’emplois et quémander quelques nouvelles subventions publiques.

Le journal La Tribune parle même de risque de faillite. Chiche  ! [1] Aux appels au secours de la famille Peugeot, la seule réponse qui conviendrait est celle de son expropriation. Car des milliards d’euros, il y en a, à l’abri dans des holdings financiers mis en place pour contrôler dans l’opacité les activités industrielles. En 2007, quelques mois avant l’irruption de la crise, 40 % du bénéfice de PSA a été distribué en dividendes aux actionnaires, en grande partie directement versé à la famille Peugeot. Il a été suffisamment reproché au gouvernement Sarkozy d’avoir renfloué les banques au plus fort de la crise pour tolérer aujourd’hui de nouveaux sauvetages de ce type. L’urgence est bien à la construction de la riposte pour empêcher l’application des plans de la direction de PSA.

Le rassemblement devant le siège de PSA à Paris, le 28 juin, témoignait déjà d’une progression de la mobilisation parmi les salariés d’Aulnay, d’une expression de la solidarité s’étendant aux autres usines du groupe PSA en France et en Espagne, et de message adressé par les travailleurs d’Opel Bochum, eux aussi confrontés à la menace de fermeture de leur usine. En retour, le message adressé par la CGT de l’usine PSA de Mulhouse aux salariés Opel de Bochum témoigne de l’intérêt à tisser ces liens d’information et de soutien par-delà les firmes et les pays.

La direction de PSA a attendu la mi-juillet et les congés pour enfin rendre public son plan. Cette manœuvre ne suffira pas à étouffer la construction de la riposte. Une grève imprévue des intérimaires de la peinture avait déjà réussi à bloquer près de la moitié de la production de l’usine, exemple de résistance des salariés non inscrite dans les plans de ceux qui dirigent. La réaction immédiate des travailleurs d’Aulnay et de Rennes à l’annonce du plan montre qu’ils et elles ne se laisseront pas faire. Jean-Pierre Mercier, représentant de la CGT d’Aulnay, a annoncé que les salariés allaient « organiser la lutte » et la « démarrer en septembre » : « Philippe Varin [PSA] nous a déclaré la guerre, nous allons lui faire la guerre ». Quant aux salariés de Rennes, ils se sont rassemblés ce vendredi midi à plus d’u millier sur le site de La Janais aux cris de "non aux licenciements" pour protester contre les suppressions de postes annoncées hier par le groupe.

La fermeture annoncée de l’usine d’Aulnay peut, au-delà de l’usine, du groupe PSA et du secteur automobile, cristalliser l’urgence à coordonner les luttes, à lutter ensemble contre les licenciements et les suppressions d’emploi. C’est un objectif à construire, dès maintenant.

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13 juillet 2012, par NPA 49

[1] Il faut évidemment relativiser ! Sur les profits du groupe Peugeot, on pourra lire utilement la chronique de Pierre Deruelle dans la revue Reflets : Comment j’ai découvert que PSA fabriquait des automobiles