Borne à Angers : promesses rebattues et casserolade

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Angers, village Potemkine [1]

Jeudi 1er juin, la première ministre Elisabeth Borne menait une opération de communication à Angers, accompagné par le ministre des Solidarité, J.-C. Combe. Cette venue dans une crèche d’Angers [2] à la Roseraie a été organisée en toute discrétion... Aucun·e syndicaliste n’a bien sûr été invité·e. Même la presse n’a été informée que le jour même du lieu de la rencontre et les photographes de presse ont été écarté·e·s au profit d’un photographe officiel “embedded” d’une agence liée à la députée LREM Laetitia St-Paul !

Casserolade intersyndicale

Cette volonté de contrôler totalement l’image médiatique de la visite n’a pas empêché l’organisation à la hâte d’un comité d’accueil intersyndical : il fallait rappeler à Borne que nous n’oublions pas les mois passés et que nous ne lâcherons pas le combat pour la défense de nos retraites et contre les méthodes gouvernementales dignes des États autoritaires.

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Plus de deux cents syndicalistes, gilets jaunes, étudiant·e·s et lycéen·ne·s... se sont regroupé·e·s dès 9h30 dans un quartier de La Roseraie vidé de ses habitant·e·s et en présence d’un dispositif policier considérable. Le cortège accompagné de casseroles, de percutions et d’une sono s’est élancé dans les rues pour s’approcher de la crèche où avait lieu la rencontre. Rapidement, le cortège pacifique a été stoppé par les CRS dans une rue adjacente, puis nassé [3] pendant une heure... le temps pour Mme Borne de faire sa petite opération de communication entourée de courtisan·e·s et de journalistes privés de leurs photographes. Néanmoins, le concert de casseroles a été donné dans une ambiance festive et déterminée, pour la retraite à 60 ans et contre la répression policière et les méthode autoritaires !

Mme Borne a ensuite poursuivi sa tournée des “casserolades” en se rendant à Laval où elle était également attendue par un comité d’accueil. Plus de deux mois après l’annonce de Macron des « cent jours d’apaisement », tout va bien !

Effets d’annonce perpétuels

Du moins c’est ce que le gouvernement voudrait faire croire par une stratégie d’évitement policier des “casserolades” et diffusion d’effets d’annonce rebattus. C’est ainsi qu’après avoir fait son show à la crèche avec quelques mères de famille bien choisies, Borne en a fait un autre au centre Jean-Vilar voisin en faisant état d’un hypothétique « service public de la petite enfance » et en promettant 100.000 places d’accueil d’ici à... 2027. Lors de sa campagne électorale de 2022, Emmanuel Macron en avait pourtant promis 200.000 dans les cinq ans. C’est donc 100.000 de moins que l’annonce précédente ! Et quand Borne promet d’atteindre 200.000 en 2030, cela n’engage que les successeurs de Macron et d’elle-même...

Enfin, tout est à rapporter aux chiffres actuels : il n’existe en tout que 1,3 million de places d’accueil individuel ou collectif dont 770.000 chez les assistantes maternelles, 458.000 en crèches (à 60 % publiques & 40 % privées), 89.000 en très petites sections d’école maternelle et 47.000 en gardes d’enfants à domicile. [4] Pour créer des places et déjà satisfaire les besoins actuels, il faut des postes de professionnels. Il en manque déjà au moins 10.000 dans les crèches ! Sur ce terrain, comme sur celui de la formation, les déclarations gouvernementales sont largement insatisfaisantes. Ainsi, sur les 270.000 assistantes maternelles aujourd’hui en exercice, 120 000 seront à la retraite en 2030. Qui formera les remplaçantes et avec quels moyens ? On peut subodorer que ce gouvernement néolibéral de destruction des services publics renverra aux communes et au privé ses propres responsabilités. Les travailleuses et travailleurs du secteur comme les parents ne sont pas dupes des effets d’annonce. Les luttes sont décidément devant nous !

1er juin 2023, par NPA 49

[1] Lors d’une tournée dans les campagne russes de l’impératrice Catherine II, le ministre Potemkine fit embellir des villages pour lui donner l’illusion d’une paysannerie riche et prospère. “Village Potemkine” désigne depuis la falsification d’un lieu à des fins de propagande.

[2] La crèche Roger-Mercier du groupe Vyv3

[3] La nasse est une technique d’encerclement des manifestant·e·s par les forces de l’ordre. Cette technique est illégale et considérée comme une atteinte au droit de manifester et de circuler. Mais elle très régulièrement utilisée par l’État français depuis les luttes contre la loi travail en 2016 et la lutte des gilets jaunes.

[4] Cf ; article de Le Monde du 1er juin 2023.