Le « Tribunal des grandes ignominies » condamne Technicolor !

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Le procès symbolique de Technicolor organisé par l’intersyndicale de Thomson-Angers (voir le communiqué de l’intersyndicale) et le syndicat français des artistes (SFA-CGT) a été un grand moment de théâtre militant et de lutte. Environ cinq cents personnes (salarié(e)s, militant(e)s et passants) y ont assisté, place du Ralliement à Angers vendredi 5 octobre. Peu après la représentation, quelques élus angevins et la ministre Fleur Pellerin ont fait une apparition. Mais le discours de la ministre n’a été qu’une piteuse variante du « L’État ne peut pas tout » de Lionel Jospin...

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Le tribunal des grandes ignominies
De gauche à droite : la procureure, le greffier, le juge, l’accusé Rose et son avocat, l’infâme Me Brongnard.

Ce TGI particulier, le Tribunal de Grande Ignominie, faisait s’affronter les plaignants et témoins, salarié(e)s ou ancien(ne)s salarié(e)s de Thomson, et le PDG de Technicolor, le dénommé Rose. Enfin presque : peut-être que ce n’était pas le vrai patron voyou, mais il y ressemblait. Juge et greffier, avocate des plaignants, procureure de la République et avocat du susnommé Rose n’étaient pas non plus tout à fait authentiques, mais leurs habits faisaient le moine et leur talent d’acteurs le reste.

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Les jurés

Les jurés, qui portaient le T-Shirt « Technicolère », n’avaient sans doute pas, pour une fois, été choisis dans le 16e arrondissement de Paris. Quant à la "salle", c’est à dire la place où se massait le public, elle manifesta bruyamment à plusieurs reprises son soutien aux salarié(e)s et lança maintes invectives contre le triste Rose et son démoniaque avocat, le terrible Me Grognard, alias Brongnard (comme le palais de la bourse). C’est pourquoi le juge dut intervenir à plusieurs reprises pour rétablir la sérénité des débats...

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Le public

Les meilleures œuvres artistiques allient souvent le tragique et le comique et ce fut le cas de ce vrai-faux procès. Partant des origines (1957, lorsque Thomson remplaça Bessonneau) jusqu’à cette période où la direction commença à organiser la mise en faillite de son usine, plusieurs témoignages émouvants ou poignants sont venus restituer ce qui fut et est encore la vie de centaines de salarié(e)s.

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Témoignage
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Syndicalistes : l’ancien et l’actuelle
Michel Bouet et Odile Coquereau

L’accusation ne fut pas en reste, portée successivement par le témoin syndicaliste Odile Coquereau, par l’avocate des plaignants et par la procureure de la République. Oui, Technicolor a organisé le déficit de l’usine en la maintenant sous dépendance exclusive du groupe et en lui achetant les décodeurs à un prix inférieur au prix de production. Oui, Technicolor a organisé sa délocalisation au Vietnam pour y faire travailler des ouvriers dans des conditions épouvantables. Alors, Technicolor est coupable, la faillite doit être refusée, les salarié(e)s indemnisé(e)s, son PDG condamné pour non-assistance à personnes d’Angers.

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L’avocate des plaignants, la procureure et l’avocat du PDG

La plaidoirie de la défense fut cependant un morceau d’anthologie. Le mépris de classe affiché derrière sa barbe, l’infâme Me Brongnard n’hésita pas à plagier Laurence Parisot et à dénoncer le racisme anti-riches. Il rappela que si le salaire de M. Rose avait été doublé entre 2008 et 2010 pour atteindre le million d’euros, c’est qu’il était nécessairement un bon gestionnaire, reconnu par son conseil d’administration. Il fallait bien, d’ailleurs, que les actionnaires perçoivent un revenu pour tout ce qu’ils avaient investi. Car ces actionnaires, eux, n’avaient pas le droit à l’assurance-chômage que les salarié(e)s allaient de leur côté percevoir. Et puis, que signifiait ce refus de leur part de rejoindre l’armée des 3 millions de chômeurs et chômeuses de ce pays ? N’y avait-il pas là une autre forme de racisme, contre les chômeurs eux-mêmes ? En conclusion, Me Grognard demanda logiquement la relaxe de son client...

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Délibéré du jury

Les jurés et le juge ne l’on évidemment pas suivi, La faillite a été déclarée irrecevable. Le PDG a été déclaré coupable et condamné à des travaux d’intérêt général. Rien de plus éducatif pour un PDG que de venir travailler à la chaîne et en cadence ! La foule a bruyamment applaudi !

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PDG voyou contraint d’endosser la blouse ouvrière
Il va devoir faire des TIG !

Peu après la fin du procès, et alors que la foule avait déjà commencé à se disperser, quelques élus angevins firent leur apparition ; d’abord J.-C. Antonini (président de l’agglo), ensuite F. Beatse (maire d’Angers)... Et puis ce fut la ministre en charge des PME, Fleur Pellerin et son staff qui fit une brève intervention. Dans son discours aux salarié(e)s présent(e)s, elle a assuré que le gouvernement faisait tous ses efforts pour sauver Thomson Angers. En fait, ces efforts se sont résumés à solliciter les opérateurs téléphoniques pour passer commande de décodeurs et seule France Telecom a semblé répondre. Elle a avoué en revanche que le gouvernement n’était pas parvenu à entrer en relation sérieuse avec les dirigeants de Technicolor. Odile Coquereau a répondu pour sa part que d’autres efforts étaient attendus, comme une loi contre les licenciements boursiers. Des slogans comme "interdiction des licenciements" ont été repris.

Pour nous, militant(e)s du NPA, c’est une réquisition de Thomson-Angers qui est nécessaire. Les belles paroles des élus locaux et de la ministre ne suffisent plus. À quelques jours du jugement (véritable celui-là) du TGI de Nanterre, il faut des actes, vite !

5 octobre 2012, par NPA 49