Un premier mai de revendications au balcon !

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Partout en France, des banderoles et affiches ont fleuri aux balcons, portes et fenêtres des maisons et immeubles pour donner à ce premier mai confiné la couleur d’une vraie journée internationale de lutte de la classe travailleuse, parfois au grand dam de la police de l’Etat français (comme à Toulouse). Quelques clichés angevins et un point sur la situation basé sur une note de la commission Santé-Sécu-Social du NPA...

Crise du COVID-19 : un point sur la situation

A) Situation internationale

La pandémie continue de s’étendre. L’épicentre devient désormais les USA. Une deuxième vague, moins importante, apparaît en Asie, touchant principalement certaines catégories de la population : à Singapour, les travailleurs précaires ; en Chine, par la réintroduction du virus par ceux qui reviennent au pays. L’Amérique latine et l’Afrique sont désormais touchées. Le nombre de cas est en hausse en Afrique, malgré un recensement très partiel. Au Brésil, la situation devient critique. En Europe, une certaine stabilisation s’opère, mais à un niveau élevé. Le risque existe que la reprise de l’activité économique, en cours dans tous les pays, ne provoque une nouvelle vague arrivant sur un système de santé déjà très éprouvé. Enfin, une nouvelle inquiétude naît avec l’apparition d’un syndrome respiratoire grave qui toucherait des enfants de 8 à 14 ans et aurait un lien avec le coronavirus.

Les effets de la crise économique et sociale deviennent massifs

Les chômeurs se comptent par millions. les précaires, « informels », indépendants se retrouvent sans ressources, avec pour conséquence le retour de la faim (y compris dans les pays dits riches), l’éventualité de perdre son logement, les difficultés voire l’impossibilité d’accéder aux soins. La situation des migrant.e.s s’est encore aggravée.

B) En France

L’actualité principale de la semaine est le « plan de déconfinement » présenté par Édouard Philippe au parlement-croupion le 28 avril et approuvé par celui-ci.

Le contexte sanitaire

Ces annonces ont lieu dans un contexte sanitaire où les tendances restent les mêmes : décrue des admissions Covid à l’Hôpital, recul du nombre de patient.e.s en réanimation, maintien d’un nombre élevé de décès, mais retour et afflux vers l’hôpital de patients ayant d’autres pathologies que le Covid, leur état de santé s’étant aggravé.

Les lits « non Covid » se remettent en place, les blocs opératoires s’apprêtent à rouvrir (2500 opérations ont été déprogrammées à Toulouse pendant le pic de l’épidémie). Absorber cette surcharge de travail est très lourd pour des équipes déjà épuisées, alors que les renforts temporaires disparaissent. Dans ces conditions, une relance de l’épidémie et un nouvel afflux de patient.e.s Covid seraient catastrophiques. Philippe lui-même l’a reconnu dans son intervention… sans bien sûr en tirer les conclusions nécessaires pour renforcer le système de soins !

Partout les directions hospitalières, sans budgets supplémentaires, continuent de bloquer tout recrutement permanent et statutaire. L’heure est plutôt à serrer la vis sur les dépenses, à faire appel appel à la charité et aux dons pour le matériel, à obliger les personnels à prendre des congés et des RTT, en élargissant les plages de travail (Tours), à interpréter de la manière la plus restrictive l’attribution de la prime de 1500 euros. Contrairement aux allégations gouvernementales, la situation concernant les masques et les matériels de protection n’est toujours pas satisfaisante, même si elle s’est améliorée. Obtenir des masques et des surblouses, relève toujours de la « débrouille », et la qualité du matériel, souvent payé à des prix exorbitants n’est pas toujours au rendez vous.

Le « plan Philippe »

« E.Philippe s’engage dans un déconfinement à reculons », pouvait titrer le Monde. L’intervention du Premier ministre était censée mettre en musique la déclaration de Macron sur le déconfinement à partir du 11 mai. Elle en donne en réalité une interprétation restrictive, illustrant à la fois l’improvisation permanente et les contradictions au sein d’un exécutif.

L’objectif poursuivi par le pouvoir est le redémarrage au plus vite de la machine à profits, tout en évitant une catastrophe sanitaire qui la compromettrait. Des milliards ont été injectés par les États pour tenter d’éviter la spirale infernale de la crise économique. Mais il s’agit de « remèdes » à court terme qui creusent les déficits. Pour les capitalistes, il faut en sortir rapidement, en attendant de faire payer la note aux classes populaires dans les mois qui viennent. La difficulté pour eux est de sortir du confinement sans trop relancer l’épidémie.

Le pouvoir du fait de ses politiques antérieures n’avait pas les moyens d’affronter la crise sanitaire (manque de matériel, affaiblissement du système public de santé...). Mais il s’est avéré tout aussi incapable de profiter des délais depuis le début de la crise, puis du confinement, pour mettre en place une stratégie de sortie un tant soit peu construite et efficace accompagnée des moyens correspondants. Les cafouillages et l’inertie sur la question des masques jusqu’à aujourd’hui en témoigne. Les annonces de Macron sur la « sortie » le 11 mai, dont même les ministres n’étaient pas au courant, partaient du principe monarchique selon lequel « l’intendance suivrait »... Il a fallu depuis au gouvernement improviser en catastrophe en se confrontant à la réalité.

Le « plan Philippe » est bien un plan de retour au travail. Si le télétravail pour celles et ceux qui peuvent le pratiquer est réaffirmé, pour les autres, l’incitation financière est forte à retourner quoiqu’il arrive au boulot : suppression des indemnités journalières pour les parents qui gardent leurs enfants, basculées dans le chômage partiel. Et par la suite, il faudra prouver que l’on a pas de solution pour garder son enfant. La transformation de l’école en garderie, pour les enfants qui ne peuvent rester seuls (maternelle, élémentaire, puis 6ème-5ème), au mépris des risques avérés de contaminations, est bien confirmée.

Mais le « plan Philippe » louvoie en permanence, et tente de se donner des portes de sortie en cas d’échec, dont il rejettera la « faute » sur les « comportements irresponsables » des individus et le mauvais pilotage des élus sur le terrain.

Le déconfinement commencera le 11 mai… sauf si les indicateurs ne le permettent pas. La liberté de circulation sera rétablie... sauf pour les département ayant un indicateur « rouge » qui ne le permettrait pas. Les établissements scolaires vont rouvrir... mais, pour l’instant, seulement pour le primaire, puis les premières années du secondaire. Les conditions pour l’accueil de ces enfants sont telles qu’on voit mal comment elles pourront être réalisées.

« Protéger, tester, isoler » : une stratégie sans moyens

Les principes posés par Philippe, sont bien ceux qu’ils faudrait appliquer. Ils ont fait leur preuve, en l’absence de vaccins et de traitements, depuis la lutte anti tuberculeuse au début du 20e siècle jusqu’aux épidémies récentes en Afrique ou Haïti. Encore faut il en avoir les moyens.

Protéger :
-  Quand, malgré les annonces, les masques continuent à être rares et ne sont pas gratuits ?
-  Quand les salariéEs qui retournent au travail ne sont protégés suffisamment ni dans leurs déplacements (transports en commun) ni sur leur lieux de travail, et quand celles et ceux qui sont les plus exposés (santé, transports, commerce...) n’ont toujours pas le matériel nécessaire ?
-  Quand les enfants retournant à l’école courent de grand risques de se contaminer et de contaminer leur famille ?

Tester :
-  L’annonce de l’accroissement du nombre de tests (700 000 par semaine au 11 mai) ne garantit pas que les tests pourront être pratiqués et lus à une échelle suffisante.
-  La réalité reste encore aujourd’hui que même les personnels les plus exposés (EHPAD, Hôpitaux) ne sont pas testés systématiquement.

Isoler :
-  Là aussi, aucune garantie une nouvelle fois que l’intendance suive.
-  Il faudrait de très nombreux hôtels ou lieux de résidences pour accueillir de façon décente les « isolé.e.s ».

Sur ces deux points, tester et isoler, la question ne se résume pas à la fourniture du matériel. Il faut aussi disposer des équipes compétentes et formées capables de pratiquer les tests, le traçage des contacts, et d’assurer le suivi personnalisé, seule manière d’obtenir la participation active des personnes concernées (voir article à ce sujet sur le site du NPA )

Là où il faudrait des équipes dédiées et formées, le plan du gouvernement, qui reconnaît le problème, n’envisage que la participation des généralistes (comment peuvent-ils faire en plus ce travail ?) et de « brigades » de bénévoles (Croix rouge…).

La seule perspective que semble avoir, faute de moyen, le gouvernement est le « traçage » du trajet des personnes porteuses du virus et leurs contacts, par une application liberticide mais inefficace Stop-covid. Mais que le « plan Philippe » n’a pour l’instant pas mise en œuvre...

Exit le plan massif d’investissement pour la santé annoncé par Macron

On chercherait en vain, alors que le système de santé est épuisé et manque aujourd’hui de moyens, l’ébauche, dans le discours du Premier ministre, d’un plan pour attribuer à l’hôpital et au système de santé les moyens massifs et durables dont il a immédiatement besoin, pour faire face à la suite de l’épidémie et répondre aux autres besoins de santé. Et les 41 milliards de déficit de la sécurité sociale annoncés par Darmanin permettent dores et déjà de dire que l’austérité renforcée est à l’ordre du jour.

On chercherait également en vain dans le « plan Philippe » une réponse aux besoins des secteurs les plus fragilisés de la population (alimentation, logement, santé).

Notre sortie du confinement

Deux sorties de confinement sont possibles.
-  La leur est le redémarrage au plus vite de la machine à profit au détriment de la santé de la population , et en s’apprêtant à faire payer la crise à ceux d’en bas.
-  La nôtre, qui met en avant la priorité à la santé et aux besoins du plus grand nombre.

Cette dernière nécessite :
-  d’imposer la réquisition et la remise en route sous le contrôle des travailleurs et de la population des secteurs indispensables ;
-  la fourniture gratuite et en nombre suffisant du matériel de protection indispensable à toute la population, à commencer par les masques ;
-  l’investissement massif dans les services publics à commencer par la santé avec un plan emploi formation de 120 000 emplois pour l’hôpital, de 80 000 emplois pour un service public de la dépendance, dans et hors institution, de 25 000 emplois pour un service de santé public communautaire, éléments d’un service public de santé sur le territoire.

(D’après une note de la commission Santé-Sécu-Social du NPA)

NOS VIES VALENT PLUS QUE LEURS PROFITS

1er mai 2020, par NPA 49