Angers : Gilets jaunes & Marche pour la justice sociale et climatique

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Parties à la même heure du même point de départ, le jardin du mail, la manifestation des Gilets jaunes et la marche pour la justice sociale et climatique auront finalement divergé, samedi 26 janvier à Angers. Pour le climat, le nombre de participant.e.s (200 au meilleur moment) s’est avéré décevant en comparaison de ce qu’il avait pu être le 8 décembre. Le nombre des Gilets jaunes, sans doute plus de 600, est resté quant à lui très conséquent dans la mesure où la manifestation n’avait pas le caractère régional de la semaine précédente. Quelques affrontements se sont produits en fin de parcours après l’utilisation par la police de gaz lacrymogènes (qui ont également gazé le centre-ville pour le plus grand déplaisir des passants).

Des lacunes dans l’organisation des deux manifestations sont sans doute à déplorer, en particulier pour la marche pour le climat. Si le travail des associations qui appelaient à cette marche doit être salué, on peut regretter que le travail d’information, en particulier vers les organisations syndicales et politiques, n’ait été que fort tardif, quand il a eu lieu. De plus, la presse locale n’a que peu ou pas relayé l’appel à manifester (un simple entrefilet dans le Courrier de l’ouest de samedi !) Surtout, si la convergence avec les Gilets jaunes est éminemment souhaitable et était indubitablement souhaitée par les associations impliquées (ATTAC 49, En Transition et les collectifs Justice Climatique Angers et Résistance à l’Agression Publicitaire, etc.), elle n’était pas gagnée d’avance et, de fait, s’est avérée prématurée. En appelant au même lieu et à la même heure que les Gilets jaunes, les organisateurs ont pris le risque de l’incompréhension, à la fois de certaines ONG (notamment Oxfam), mais aussi de Gilets jaunes qui ont pu croire à une sorte de manipulation, ce qui n’était pourtant pas l’intention véritable.

Il faudra en tirer les leçons pour l’avenir car l’objectif d’une convergence des luttes doit absolument être poursuivi. Le système capitaliste est à la fois responsable de la croissance des inégalités et du dérèglement climatique et écologique. C’est cet ennemi commun qu’il faut combattre et c’est ce système qu’il faut changer. Et il y a urgence à le faire : la croissance des violences sociales, des guerres, des migrations forcées, des dérives sécuritaires et autoritaires partout dans le monde sont désormais inséparables de signaux de plus en plus alarmants sur l’état de la planète et des dangers que fait peser la logique productiviste capitaliste sur les conditions mêmes de la vie végétale et animale. À cet égard, le bilan de l’année 2018 que dresse la Commission nationale écologie du NPA est sans appel. Nous le reproduisons ci-dessous.

Un bilan de l’année 2018 écoulée

Année après année, les conférences sur le climat se succèdent, sans aucune mesure contraignante pour les États, et les catastrophes climatiques s’intensifient. L’année 2018 a connu des événements climatiques extrêmes, qui touchent l’ensemble de la planète, en particulier les pays du Sud dont le bilan carbone est pourtant bien inférieur à celui des pays du Nord.

Asie-Pacifique

Inondations au Népal et au Bangladesh, super typhon Mangkhut aux Philippines, fonte des glaces himalayennes… À chaque catastrophe non naturelle, des dégâts matériels et des centaines de mortEs. En Inde, suite à des pluies deux fois et demi supérieures à la normale, des inondations record ont provoqué la mort de 500 personnes et contraint plus d’un million d’autres à se réfugier dans des camps.

À ces phénomènes météorologiques extrêmes, qui menacent la biodiversité, s’ajoutent d’autres fléaux  : élévation du niveau de la mer, espèces exotiques envahissantes, intensification de l’agriculture, surpêche, augmentation des déchets et de la pollution, déforestation… 60 % des prairies sont dégradées, près de 25 % des espèces endémiques sont menacées et 80 % des rivières les plus polluées par les déchets plastiques dans le monde se trouvent dans cette zone. Si les pratiques de pêche se poursuivent au même rythme, la région ne comptera plus de stocks de poissons exploitables d’ici à 2048. Les îles Fidji sont menacées de disparition avec l’élévation du niveau des océans due à la fonte des glaces des pôles.

Afrique

Le climat s’emballe  ! Vagues de froid au Maroc, fortes intempéries en Tunisie et incendies monstres en Algérie, cyclone au Mozambique, inondations au Sierra Leone, au Nigéria… Au début de l’année, suite à une sécheresse qui dure depuis 2015, la métropole du Cap en Afrique du Sud a envisagé un accès à l’eau restreint à 25 litres par jour et par personnes, sous la surveillance de la police et de l’armée.

Des manifestions nettes du basculement du climat auxquelles se rajoutent la dégradation des écosystèmes  : 500 000 km2 de terres sont dégradées du fait de la déforestation, de l’agriculture non durable, du surpâturage, des activités minières, des espèces invasives ou du réchauffement. Or, en zone rurale, la subsistance de près des deux tiers des habitantEs dépend de la bonne santé des milieux naturels. À la fin du siècle, certaines espèces de mammifères et d’oiseaux pourraient avoir perdu plus de la moitié de leurs effectifs, et la productivité des lacs (en poissons) avoir baissé de 20 à 30 %.

Amériques

Tornades et ouragans violents au Canada, en Caroline, incendies dévastateurs en Californie où sévit une sécheresse chronique, glissement de terrain au Brésil, déforestation en hausse… L’entêtement criminel de Trump n’y peut rien  : le continent américain est aussi touché. Là aussi, l’impact du dérèglement climatique sur la biodiversité va s’intensifier d’ici 2050. Les espèces indigènes ont décru de 31 % depuis la colonisation par les Européens, et ce taux pourrait monter à 40 % au milieu du siècle. Par rapport à leur état originel, plus de 95 % des prairies d’herbes hautes d’Amérique du Nord, 50 % de la savane tropicale et 17 % de la forêt amazonienne en Amérique du Sud ont été transformés en des paysages dominés par l’homme. En cause, l’hyper-­développement productiviste, l’exploitation intensive du sous-sol, les transports des matières premières et marchandises, et «  l’American way of life  »… pour celles et ceux qui en ont les moyens.

Europe-Asie centrale

Chaque été, la canicule frappe, même en Suède, en Finlande. Les fortes pluies, qui ne peuvent s’écouler tant les surfaces sont bétonnées, inondent villes et villages, obligeant les habitantEs à fuir. En Europe et en Asie centrale, 42 % des animaux terrestres et des plantes ont enregistré un déclin de leurs populations au cours de la dernière décennie, de même que 71 % des poissons et 60 % des amphibiens. Sans surprise, la première cause de cette hécatombe est l’intensification de l’agriculture et de l’exploitation forestière, et particulièrement dans l’usage excessif de produits agrochimiques (pesticides, engrais). Résultat  : la région consomme plus de ressources naturelles renouvelables qu’elle n’en produit, l’obligeant à en importer massivement d’autres zones du monde.

Toujours plus de déracinéEs climatiques

L’ONG Oxfam estime que « la montée des eaux, l’évolution des précipitations et d’autres changements réduisent les moyens de subsistance et augmentent le risque de voir, à l’avenir, beaucoup plus de gens se déplacer ». Pourtant, ni la protection, ni l’accueil, ni le statut des millions de déplacéEs et réfugiéEs climatiques ne sont au programme des COP successives. Les frontières se referment, les ports refusent même l’accueil des bateaux humanitaires  : c’est la seule réponse des gouvernants, qui refusent toute solution politique globale. Car, pour eux et les grands groupes industriels et financiers, il s’agit de se servir de la question du climat pour continuer à faire des profits. L’économie mondiale consacre beaucoup plus d’argent aux énergies fossiles qu’aux actions d’économie d’énergie et aux renouvelables…

Il est encore temps d’agir !

Les gouvernants, serviteurs volontaires des grands groupes industriels et financiers, refusent de s’attaquer aux causes de la crise écologique. Face à cela, le succès des marches mondiales pour le climat, de la pétition contre l’inaction climatique, mais aussi la montée des préoccupations environnementales, comme l’a révélée le bouillonnement d’idées dans la marmite des Gilets jaunes qui se sont mis en mouvement, en France, en Bulgarie, en Allemagne, en Irak, en Belgique… sont un encouragement et le signe que les populations vont devoir agir ensemble, sans tarder.

Seules les mobilisations des peuples pourront imposer d’autres modes de production et de consommation, et sauver le climat. Nos propositions éco­socialistes dessinent un autre monde, en rupture avec les modèles économiques ­capitalistes, énergivores et polluants.

26 janvier 2019, par NPA 49