Cette analyse date de 2002, après que Le Pen était parvenu au second tour des présidentielles. Depuis, le Front national s’est considérablement affaibli. Néanmoins, l’extrême-droite reste à un étiage élevé en Flandre, aux Pays-bas, en Autriche, au Danemark, etc. Et rien ne garantit que la faillite du sarkozysme ne libèrera pas de nouvel espace pour les héritiers de Le Pen. D’où la nécessité maintenue de mieux comprendre pour mieux combattre toute renaissance du fascisme...
* Avant l’émergence du Front National en France en 1983, puis de ses homologues européens, il existait une tendance à baptiser "fasciste" toute forme de répression contre le "mouvement ouvrier" ou toute forme de dictature (cf. le "fascisme rouge" à l’Est).
* Depuis, la place électorale qu’occupent dans plusieurs pays d’Europe les organisations d’extrême droite xénophobes relance en permanence les débats sur leur nature et celle du fascisme.
* De là se trouve confirmée la nécessité d’étudier le contexte historique précis des premières apparitions du fascisme, surtout en Italie et en Allemagne (le cas des fascismes ibériques – qui durèrent bien plus longtemps – mériterait une étude particulière).
Le contexte politique et économique d’avant la première guerre mondiale :
• Unifications nationales tardives (Italie : 1866 ; Allemagne : 1871), "par le haut", sous la direction des forces militaro-féodales (Allemagne) ou monarchiques (Italie).
• Industrialisation rapide à la fin du XIXe siècle. Croissance d’un prolétariat jeune et actif, sans que des structures "modernes" de pouvoir aient pu être mises en place (rôle important des "Junkers" en Allemagne) ou accentuant les inégalités entre régions ("sous-développement" du sud de l’Italie). Dans les deux cas la Bourgeoisie apparaît faible en tant que classe, ou divisée.
• Expansion coloniale limitée, réalisée "trop tard" (Italie : Erythrée/1890, Libye/1912 ; Allemagne : Cameroun/1884, Namibie/1890) et de façon parfois très violente (en 1904 dans une Namibie destinée à devenir "colonie de peuplement", environ 75% des Hereros sont exterminés par la Schutztruppe).
La catastrophe de la guerre :
• En 1914, La social-démocratie européenne éclate : à l’exception de la Russie et de l’Italie, elle soutient majoritairement la guerre (Mussolini rompt avec le PSI après avoir adopté des positions bellicistes).
• Des millions de morts. Quatre ans de souffrances. Accoutumance des castes d’officiers et de sous-officiers aux meurtres de masse.
• L’Allemagne est vaincue, l’Autriche-Hongrie démantelée, l’Italie (qui est dans le camp des "vainqueurs" mais a fait militairement piètre figure) n’a pas pu faire valoir toutes ses prétentions "irrédentistes" sur la Croatie et l’Albanie.
• La révolution éclate en Allemagne et en Hongrie, prenant comme modèle explicite la Révolution russe. Écrasement par les troupes locales (Allemagne) ou étrangères (Hongrie).
La crise économique sociale et politique de l’après-guerre :
• Le "Monde d’hier" (S. Zweig) s’est écroulé. Disparition des dynasties Romanov, Habsbourg et autres Hohenzollern. Révolution en Russie. Situation révolutionnaire en Allemagne, en Autriche et en Hongrie. Instabilité sociale en Italie, avec incapacité de l’État à réprimer les mouvements sociaux.
• Profonde crise économique : hyperinflation en Allemagne et en Italie.
• Remontée au premier plan du mouvement ouvrier. En Allemagne, elle survient après quatre ans "d’union sacrée", et se traduit par l’éclatement de la social-démocratie (SPD) en deux fractions et l’émergence du Parti Communiste (KPD). En Italie, les grèves avec occupation et conseils d’usine, ou les occupations de terres traduisent un mouvement plus social qu’immédiatement politique.
Les différences entre les situations allemande et italienne :
• En Allemagne, collaboration du SPD majoritaire avec l’armée et la Bourgeoisie pour stabiliser le pays (écrasement de la révolution spartakiste, assassinats de Rosa Luxemburg et de Karl Liebknecht par des officiers sous l’autorité de ministres SPD...). Dans ces conditions, la carte du fascisme n’apparaît pas encore crédible (échec grotesque du putsch Hitler/Ludendorff de 1923). C’est la crise de 1929 (terrible en Allemagne : 6 millions de chômeurs en 1931) qui redonne une seconde chance à Hitler.
• En Italie, le PSI refuse l’alliance avec la Bourgeoisie et demande son adhésion à la 3e Internationale. Mais il reste un parti réformiste, trop timoré pour mener la politique révolutionnaire qu’exige pourtant la situation. Les libéraux choisissent la manière forte pour écraser le mouvement ouvrier et paysan : dès 1921, ils s’allient avec les fascistes.
Aspects culturels spécifiques :
• Exaltation de la violence "libératrice" et de la guerre dans certains cercles intellectuels, voire artistiques (Italie : mouvement "futuriste" de Marinetti, dès 1909).
• Renaissance de théories romantiques "irrationalistes" en Allemagne ("Blut und Boden"), renforcées par l’écroulement du mythe scientiste du "progrès".
• Développement de l’antisémitisme "biologique" en plus de l’antisémitisme religieux en Allemagne et en Autriche allemande à la fin du XIXe et au début XXe siècle (notamment à Vienne, où les intellectuels indigènes entrent en concurrence avec les Juifs germanophones venus des confins de l’Empire).
• Le mouvement ouvrier allemand n’a pas été confronté à une "affaire Dreyfus". Les juifs sont parfaitement intégrés, aussi bien à la bourgeoisie qu’au prolétariat, et la gauche sous-estime l’enracinement de l’antisémitisme (cf. Brecht : "Têtes rondes et têtes pointues").
Le recrutement :
• Les mouvements fascistes sont des mouvements de masse. D’abord : des bandes armées (officiers, anciens combattants nationalistes, chômeurs...) Et puis, très vite : recrutement dans la petite-bourgeoisie frappée par la guerre et la crise, l’inflation, le développement du grand capitalisme.
• Parallèlement, tentative d’influencer et de gagner une partie de la classe ouvrière (discours populistes de l’ancien socialiste Mussolini, drapeau rouge du parti nazi "des travailleurs allemands"...). Cette tentative se heurte à la réalité des alliances de classe, mais rencontre un certain succès chez les travailleurs les moins politisés et les chômeurs.
Les programmes fascistes :
• Deux constantes : l’anticommunisme et le nationalisme, accompagné de revendications territoriales ("irrédentisme" italien, "Lebensraum" allemand). Dans le cas nazi, s’y ajoute un antisémitisme raciste dont les marxistes, en particulier, ne perçoivent pas immédiatement les terribles conséquences.
• Des aspects populistes démagogiques, voire anticapitalistes (cf. le programme nazi en 25 points de 1920, ou les premières années du fascisme italien).
• Mais une contradiction de taille : en Italie, comme en Allemagne, c’est grâce à une alliance avec le grand capital que les fascistes et les nazis parviennent au pouvoir. En Italie, Mussolini réalise sa "conversion" en mettant en oeuvre le "corporatisme", basé sur la "collaboration" (sic) entre le salariat et le patronat. En Allemagne, Hitler doit éliminer son aile "gauche" : c’est le massacre des SA lors de la "nuit des longs couteaux" (1934). L’antisémitisme, ce "socialisme des imbéciles" (A. Bebel) , supplante alors définitivement toute velléité "gauchiste" (seuls trois points du programme nazi de 1920 sont appliqués par Hitler : les points purement nationalistes...)
• En fait, plus que les propositions hétéroclites des partis fascistes, leur véritable programme est la liste des "ennemis", organismes ou personnes, à éliminer (communistes, juifs, oisifs, corrompus... souvent amalgamés en une seule entité !).
Les méthodes fascistes :
• La violence, ouverte, contre le mouvement ouvrier organisé (mais aussi contre les intellectuels libéraux) : intimidation, attentats, assassinats (Grève du 1° août 1922 brisée en Italie, Attaques de meetings par les troupes du parti nazi...), puis la terreur contre la société civile.
• La propagande. Pour Hitler, il s’agit de "se mettre à la portée de la grande masse dominée par l’instinct". Parades mussoliniennes et grand-messes nazies sont les complémentaires des campagnes de haine menées par leurs journaux et la radio (média tout nouveau à l’époque).
Une dictature du grand capital monopoliste :
• Les mouvements fascistes, à l’image de leurs chefs, sont constitués pour l’essentiel de petits-bourgeois. Mais ceux-ci sont incapables d’être une force motrice dans le développement de la société capitaliste : ils ne peuvent évoluer que dans la sphère d’idées passéistes, condamnées par l’évolution matérielle.
• Les dirigeants fascistes, au départ "coincés" entre leur "anticapitalisme" proclamé et leur hostilité foncière au mouvement ouvrier organisé, vont systématiquement trancher en faveur de cette dernière, simplement parce qu’ils veulent arriver au pouvoir. Ils passent donc une alliance avec la grande bourgeoisie, en particulier avec le secteur lié à l’économie de guerre (cf. alliance d’Hitler avec les gros industriels en 1932).
• La politique économique menée en Allemagne comme en Italie renforce le pouvoir des grands groupes capitalistes. Ce sont eux qui bénéficient le plus du redressement du taux de profit consécutif à la prise du pouvoir par les fascistes.
Un embrigadement de toute la société :
• Destruction du mouvement ouvrier indépendant.
- Suppression de toute forme de démocratie (régime du parti unique).
- Terreur de masse (les camps de concentration en Allemagne sont d’abord créés pour les militants communistes et socialistes ; les intellectuels de gauche doivent émigrer ou se soumettre).
- Encadrement et embrigadement politique et policier ; intégration idéologique d’une partie du mouvement ouvrier (surtout en Italie, avec le corporatisme et le thème de l’association capital/travail ; en Allemagne, la classe ouvrière est surtout défaite et atomisée.)
• Répression plus efficace qu’une répression "normale" faite par une dictature militaire "ordinaire" : la population y joue elle-même un rôle (délation, militarisation de la jeunesse...)
• La soumission et le silence de la population est acquise par la politique de pillage des pays conquis, qui permet notamment de faire face aux pénuries alimentaires qui n’auraient pas manqué de naître dans un pays en guerre.
Mais aussi des inconvénients pour la bourgeoisie :
• A cause la disparition des partis, la Bourgeoisie n’a plus de canaux d’expression politique. En fait, en Italie comme en Allemagne le pouvoir politique s’autonomise très vite. La folie antisémite des dirigeants nazis montre bien que la machine s’est emballée...
• Aussi la Bourgeoisie ne recourt à des dirigeants politiques incontrôlables, au fascisme, qu’en dernière instance, lorsqu’elle ne peut plus rien faire d’autre pour sauver sa domination économique et sociale sur la société.
• De plus, c’est un mode de domination a priori instable. Même si les régimes italien et allemand ne s’étaient pas écroulés à la suite d’une défaite militaire, il est probable qu’en dépit des espérances hitlériennes, ils n’auraient pas duré "mille ans". Notamment parce que menant la politique du grand capital (en particulier militaro-industriel), ils travaillaient eux-mêmes à la destruction de la petite-bourgeoisie qui les avait poussés au pouvoir...
Pas de crise économique, sociale et politique comparable à celle des années 20 et 30 :
• Il existe des "amortisseurs sociaux" de la crise, même s’ils sont peu à peu rognés (Sécurité sociale, Allocations chômage, RMI...)
• Le poids du salariat est devenu prépondérant alors que les couches populaires qui avaient fourni leurs cadres aux mouvements fascistes sont devenues très minoritaires.
• Le mouvement ouvrier organisé ne menace pas la domination de la Bourgeoisie :
- la révolution russe est loin, et confondue avec le stalinisme, qui s’est effondré ;
- la social-démocratie défend une politique au service du grand capital "moderniste".
Mais il existe des facteurs pouvant en favoriser la résurgence :
- Importance du chômage, en particulier chez les jeunes. "Concurrence" entre les travailleurs "français" et "immigrés" (thème favori du Front national).
- Montée d’une désespérance sociale, qui se traduit d’une part par la croissance de la petite délinquance, de l’incivilité, et d’autre part par un recours aux solutions « sécuritaires ».
- Crise de la "Gauche" institutionnelle, qui a perdu tout crédit en tant que force politique susceptible de mener une "autre politique".
- La Droite "modérée" a subi dans les années 1990 le même discrédit auprès de son électorat (en grande partie salarié, lui aussi, du fait du poids prépondérant du salariat). Pour conserver ses positions dans l’appareil d’état, elle a parfois été tentée de s’allier au FN. Elle peut venir majoritairement à cette position en cas de crise majeure.
- Radicalisation d’une partie de la Droite au profit de courants néo-pétainistes et racistes. Mise en place d’une stratégie "dure" visant de faire du "Le Pen" sans "Le Pen" afin de bloquer la progression du Front National.
- Le début de structuration du FN en parti de masse a été cassé par la scission FN/MNR. Néanmoins, le succès de Le Pen aux présidentielles de 2002, la déconfiture du MNR, peuvent relancer la machine.
- Même si le vieillissement des cadres porteurs d’une culture de meurtre (anciens d’Algérie pour l’essentiel) joue contre lui, l’existence (réduite après la scission) d’un "service d’ordre" (DPS) structuré dans le FN reste le germe d’une milice.
Comment lutter ?
— Il y a les "mauvaises" méthodes :
- le "front républicain", qui, en tentant d’amalgamer contre lui tous les partis au nom d’une entité abstraite (la « République » ou la « Démocratie »), fait du parti fasciste la seule opposition au système et à la politique gouvernementale (nécessairement antisociale en période prolongée de récession). C’est la tactique adoptée par le PS en France face au FN. L’exemple historique le plus célèbre est l’alliance SPD-Zentrum-libéraux pendant la république de Weimar. Elle a eu pour effet de jeter les désespérés dans les bras des nazis...
- la dénonciation du "social-fascisme". Menée par le KPD et l’Internationale communiste de 1928 à 1934, cette politique visait à faire de la social-démocratie l’ennemi principal ! ("L’arbre fasciste ne doit pas cacher la forêt social-démocrate" Thaelmann, dirigeant du KPD). Elle a grandement contribué à l’accession d’Hitler au pouvoir. En France aujourd’hui, l’équivalent d’une telle politique pourrait être de sous-estimer le danger que constitue le FN, soit en mettant dans le même panier l’extrême-droite et la droite (voire la gauche !), soit en minimisant les différences entre fascisme et démocratie...
— Il pourrait y avoir de "bonnes" méthodes :
- la progression ou la victoire d’un parti fasciste reflète avant tout l’incapacité du mouvement ouvrier à résoudre une crise aiguë du capitalisme (Italie, avec les hésitations du PSI, et Allemagne, avec en particulier la lutte fratricide entre SPD et KPD) ;
- il faudrait donc offrir une perspective de lutte anticapitaliste, pour une autre société, socialiste et communiste, et au moins commencer par refuser toute forme d’adaptation à la société actuelle et à ses tares. La lutte pour une autre mondialisation, dans la mesure où elle acquiert une crédibilité à l’échelle mondiale, peut par exemple remplir ce rôle ;
- un moyen d’avancer sur cette voie ("transitoire") est la tactique de "front unique" qui vise à unifier dans la mobilisation antifasciste l’ensemble des forces susceptibles de se rallier à terme avec cet objectif (mouvement ouvrier et "jeunesse"). Il est évident que, pour que cette mobilisation ne puisse être confondue avec le "front républicain", il est nécessaire qu’elle s’appuie sur des mots d’ordre qui ne soient pas seulement humanistes (au sens étroit du mot), mais aussi tracent l’ébauche d’une certaine transformation de la société...
Novembre 2002
De la Révolution de 1918 à la prise de pouvoir de Hitler en 1933
1. L’échec de la Révolution de 1918
• 1914 : “Union sacrée” ; les sociaux-démocrates (SPD) se rallient à la guerre derrière la bourgeoisie et les Junkers.
• 1916 : dictature militaire de facto de Hindenburg et Ludendorff.
• 1917 : l’aile pacifiste du SPD fait scission et crée l’USPD, dont fait partie le Spartakusbund de Luxemburg et Liebknecht.
• 7 novembre 1918 : proclamation de la République en Bavière derrière le social-démocrate de gauche Kurt Eisner.
• 9 novembre : abdication de l’Empereur. Fuites de Guillaume et de Ludendorff. Soviets d’ouvriers et de soldats partout dans le pays. Mais le SPD, après avoir proclamé la République, passe un compromis avec l’armée et s’efforce dès lors d’étouffer la révolution.
• Fin décembre 1918/début janvier 1919 : création du KPD-Spartakusbund (Parti communiste).
• 10-17 janvier 1919 (“semaine sanglante”) : l’armée et les corps francs écrasent les spartakistes. Assassinat de Rosa Luxemburg et de Karl Liebknecht. Dans la foulée, les élections ne laissent au SPD qu’une majorité relative.
• Février 1919 : après l’assassinat de Kurt Eisner par un Junker, éphémère République soviétique bavaroise, réprimée sauvagement le 1er mai 1920 par l’armée et les corps francs. L’armée met (provisoirement) le SPD au pouvoir à Munich.
• 31 juillet 1919 vote au parlement de la constitution de la “République de Weimar”
• Octobre 1919 : scission du KPD. Le départ des ultra-gauches du KAPD va pourtant être largement compensé par l’arrivée, peu après, de la gauche de l’USPD.
• 1920 : échec du putsch d’extrême-droite de Kapp/Lüttwitz à Berlin (très peu réprimé !) ; en contrepartie, l’armée met en place à Munich le gouvernement autoritaire de von Kahr.
• 1923 : grave crise économique (hyperinflation) ; occupation de la Ruhr par l’armée française. Agitation nationaliste (y compris de la part du KPD). Le gouvernement SPD/KPD en Saxe (Zeigner) se heurte à l’opposition de plus en plus vive de l’armée et du pouvoir SPD de Berlin. L’insurrection communiste d’octobre est décommandée à la dernière minute (sauf à Hambourg). Le gouvernement de Saxe tombe aussitôt après. Le KPD a perdu sans combat...
2. La naissance du parti nazi
• Hitler arrive à Munich fin novembre 1918. Il a prétendu ensuite avoir été loin de Munich pendant la république soviétique. Ensuite, il devient indicateur de la Reichswehr. C’est à ce titre qu’il est chargé, en septembre 1919 d’infiltrer un groupuscule nationaliste et populiste, le DAP (Parti ouvrier allemand). A partir de février 1920 (meeting de la Hofbraühaus), il en devient le leader de facto.
• Programme en 25 points de Hitler mêlant nationalisme (Grande Allemagne, abrogation du traité de Versailles, “fort pouvoir central de l’Etat”...) populisme (nationalisation des cartels, imposition de la plus-value des grandes entreprises, suppression des loyers ruraux et de la spéculation foncière, expropriation des grands magasins, peine capitale pour les “traîtres, usuriers et profiteurs”...) et antisémitisme (exclusion des juifs de la fonction publique et de la presse, et expulsion des juifs venus en Allemagne après 1914).
• 1er avril 1920 : le DAP devient NSDAP. Hitler fait un premier séjour en prison (un mois !) après l’attaque d’un meeting social-démocrate.
• 9 novembre 1923 : échec de la tentative de putsch nazi du Bürgerbräukeller. Hitler passera l’année 1924 en prison et y écrira « Mein Kampf »
3. La stratégie suicidaire des mouvements ouvriers allemands
• Dans un écrit de 1932 reproduit dans « Comment vaincre le fascisme », Trotsky résume ce que fut le cours du KPD après 1923, au fur et à mesure de sa stalinisation : « (...) le Parti communiste allemand a, depuis neuf ans, réellement fait tout ce qui était en son pouvoir pour écarter les masses de lui (...) La politique capitularde de Staline-Brandler en 1923 ; le zigzags ultra-gauche de Maslow-Ruth Fischer-Brandler de 1924 à 1925 ; la servilité toute opportuniste devant la social-démocratie de 1926 à 1928 ; les aventures de la “troisième période” de 1928 à 1930 ; la théorie et la pratique du “social-fascisme” et de la “libération nationale” de 1930 à 1932, tels sont les termes de l’addition. »
• Parallèlement, le SPD continuait sa politique de compromis avec la Bourgeoisie et l’Armée “républicaines”. La politique sectaire du KPD lui sert de prétexte pour dénoncer pêle-mêle « Papen, Hitler et Thälmann » (la droite nationaliste, les nazis et les communistes).
4. La prise de pouvoir
• De 1925 à 1929, le NSDAP demeure relativement marginal, mais se structure sur tout le territoire ; ses effectifs passent de 50 000 à 180 000. La SA compte plusieurs centaines de milliers de recrues, et est financée par de gros capitalistes. Création de la SS.
• Le chômage croît rapidement à partir de 1929 et du début de la grande dépression : 2.8 M de chômeurs en janvier 1929 ; 3,2 M un an plus tard ; 4,9 M en février 1931, 5,6 M en décembre 1931...
• La crise économique déstabilise l’alliance SPD-Centre. Après la dissolution du Reichstag en juillet 1930, les élections enregistrent une forte poussée des nazis (6,5 M de voix contre 8,5 au SPD et 4,5 au KPD). Gouvernement centriste minoritaire “toléré” par le SPD et l’Armée.
• Juin 1931 : congrès du SPD « les bolcheviks et les fascistes sont des frères » (Wels).
• Juillet 1931 : Krach bancaire ; en août “référendum rouge” pour la dissolution du Landtag de Prusse, soutenu par le KPD et... les nazis
• Décembre 1931 : revirement de Thälmann contre les conceptions ultra-gauches.
• Avril 1932 : élections présidentielles (Hindenburg 19,4 M ; Hitler 13,4 M ; Thälmann 3,7 M). A la base, certains communistes et socialistes organisent une défense commune contre les attaques nazies.
• En mai 1932, le gouvernement fédéral centriste démissionne. Von Papen forme un nouveau gouvernement minoritaire, puis dissout le parlement. Aux élections (juillet), les nazis obtiennent 13,7 M de voix (SPD : 7,2 M ; KPD : 5,9 M). Premières négociations Papen-Hitler, qui échouent. Nouvelles élections (novembre) : les nazis perdent 2 M de voix.
• Gouvernement du général Schleicher. Agitation du KPD. Consultations entre Hitler et Papen, Hitler et les grands industriels.
• 30 janvier 1933 : gouvernement Hitler-Hugenburg-Papen. Le KPD propose au SPD un appel commun à la grève générale, qui le repousse (l’action extraparlementaire étant jugée prématurée : “il s’agit d’organiser, pas de manifester” [Leipart au CC de l’AGDB])
• 1er février : dissolution du Reichstag ; un décret d’exception interdit toute critique du gouvernement (le 4).
• 23 février : incendie du Reichstag ; interdiction de la presse ouvrière et suppression des droits fondamentaux. Thälmann est arrêté le 3 mars.
• 5 mars : aux élections, les nazis emportent une majorité relative (17,2 M contre 7,1 au SPD et 4,8 au KPD, dont les mandats sont annulés) mais la coalition Hitler-Papen conserve une faible majorité au parlement. Le KPD propose le front unique au SPD.
• 1er mai : l’AGDB manifeste au côtés des nazis. Les syndicats sont dissous le 2 mai...
• Juin-juillet : les partis sont interdits ou autodissous.
- du vendredi 24 au dimanche 26 mars : mobilisation dans le Poitou pour la défense de l’eau à l’appel de Bassines Non Merci et des Soulèvements de la Terre. Le 24 : arrivée de tracteurs de toute la France et, le soir, Forum international sur la défense de l’eau avec des délégations de différents pays et continents. Le 25 à 10h : manifestation « Fin de chantier » et, le soir, concerts, banquets et festivités à Melle (79500). Le 26 : assemblées, tables rondes, cantines, balades naturalistes, concerts…
- samedi 25 mars de 16h00 à minuit : Fête de Lutte Ouvrière, Salle Aragon, 1 rue Joseph Bara, Trélazé (arrêt Malaquais du bus n°2).
- mardi 28 mars : grève contre la “réforme” des retraites à l’appel de l’Intersyndicale. Manifestations à 10h à Cholet (pl. Travot) et Segré (pl. du port) ; à 14h à Angers (pl. Leclerc) et Saumur (pl. Bilange).
- mercredi 29 mars à 19h : concert de solidarité avec les grévistes, salle Emstal aux Ponts-de-Cé, organisé par LFI.
- samedi 1er avril à partir de 14h30 : “Huit heures pour la Palestine” au centre Marcelle Menet à Angers.
- dimanche 2 avril après-midi : “Un autre monde est nécessaire”, initiative du Cercle 49 dans la grande salle du centre Jacques Tati de Belle-Beille (Angers). Projection du film Rosmerta.
- Voir aussi Alter49.org, l’agenda alternatif 49, et Le Cercle 49.
En août 1940, Léon Trotsky, devenu l’ennemi juré de Staline, est assassiné à Mexico par l’Espagnol Ramón Mercader. Dans un documentaire à la mécanique de thriller, « Trotsky, un homme à abattre », Marie Brunet-Debaines (réalisatrice de “L’Ombre de Staline” (2013), “Antoine de Saint-Exupéry, le dernier romantique” (2016), “John Huston, une âme libre”, etc.) revient sur cette incroyable opération commanditée directement par Staline. Elle entraîne le spectateur dans un véritable thriller historique, nourri d’images tournées dans le Mexico d’aujourd’hui, d’archives choisies et de scènes de fiction. Son film diffusé sur Arte.tv - qui par ailleurs ne prétend pas développer une analyse politique approfondie - s’appuie sur une solide documentation, puisée, entre autres, dans les souvenirs publiés par Jean van Heijenoort, secrétaire et traducteur de Trotsky de 1932 à 1939. Cette enquête haletante éclaire aussi les dernières années, intimes et politiques, de l’un des artisans majeurs de la révolution bolchevik, qui paya de sa vie son opposition à Staline.
Le 17 septembre 2022, l’ONG socialiste ukrainienne Sotsialny Rukh (SR – Mouvement Social) tenait sa conférence nationale à Kyiv. Catherine Samary revient (ICI) sur cette conférence nationale dans une longue analyse publiée sur le site de la 4e Internationale. Loin de se contenter d’un simple compte-rendu factuel et ponctuel, Catherine Samary entend éclairer ce qu’est le profil spécifique de cette jeune gauche, à partir de sa pratique militante au cœur de la société ukrainienne et en rupture avec les grandes interprétations contradictoires dominantes de « l’Euro-Maidan » (2013-2014) qui divisent la gauche et sont exploitées par Poutine.
Figure marquante de la Quatrième internationale et de mai 68, porte parole pendant trois décennies de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), député européen, Alain Krivine, c’est l’histoire d’une trajectoire qui a croisé les grands événements de l’Histoire du XXe siècle. Sans jamais renoncer à son idéal révolutionnaire de jeunesse, il n’a cessé de se battre, jusqu’à la création du NPA. À travers les récits de ses anciens camarades tels que Edwy Plenel, Michel Field, Romain Goupil, mais aussi Arlette Laguiller, Olivier Besancenot et Ariane Chemin, se dessine dans un documentaire de Jeanne Lefèvre, “Alain Krivine : une vie en rouge”, le portrait d’un éternel militant, qui a toujours su s’adapter aux changements du monde. On peut cependant regretter l’absence dans le film de maints combats de la LCR et d’Alain, qu’ils soient internationalistes (soutiens à la Charte 77 en Tchécoslovaquie, au premier Solidarnosc en Pologne, lutte contre les guerres en Palestine, au Liban ou en Irak, etc.) ou sociétaux (féminisme ou lutte des sans-papiers à peine évoquées, écologie, etc.). À voir sur LCP et sur Dailymotion !
Alors que les effets du désastre climatique deviennent chaque jour plus évidents, qu’une gigantesque crise multiforme se précise, la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine trouve les gauches européennes divisées, souvent paralysées, presque toujours désorientées. Ainsi Alain Bihr et Yannis Thanassekos ont-ils publié un texte des plus discutable sur le site de la revue Contretemps, sous le titre « La guerre en Ukraine, le récit dominant et la gauche anti-impérialiste ». Des camarades ont souhaité y répondre dans la même revue pour exprimer d’importants désaccords et affirmer la nécessité de soutenir le peuple ukrainien face à l’agression impérialiste de la Russie de Poutine. Ce texte, intitulé ironiquement « Une gauche enrôlée dans une croisade antirusse sous la bannière étoilée ? », est signé par Sébastien Abbet, Daniel Bonnard, Geneviève de Rham, Alain Gonthier, Denys Gorbach, Robert Lochhead, Elisa Moros, Hanna Perekhoda, Philipp Schmid, Giuseppe Sergi, Daniel Tanuro, Jean Vogel et Christian Zeller.
Élaboré collectivement par des militant.e.s des cinq continents de la Commission écologie de la IVe Internationale pour analyser la crise climatique et environnementale du capitalisme et proposer une alternative écosocialiste, le dernier numéro (n°661) de la revue Inprecor constitue un document programmatique essentiel, de la taille d’un livre. Intitulé “La Destruction capitaliste de l’environnement et l’alternative écosocialiste”, ce manifeste de l’écosocialisme revient successivement sur l’accélération de la destruction de l’environnement et ses conséquences dramatiques pour l’humanité et la nature, la crise écologique en tant que résultat d’un capitalisme intrinsèquement productiviste, l’alternative écosocialiste à construire autour de revendications transitoires radicales, les débats en cours, l’issue révolutionnaire nécessaire. À lire absolument. On peut le commander à la librairie La Brèche ou le demander aux militant.e.s du NPA49.