De l’esprit de clocher au militarisme : dérives des collectivités locales

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Le sous-marin nucléaire est-il une marque triomphante de l’avenir poussant dans l’Angers Loire valley ? À lire les proses des collectivités locales du 49, on pourrait presque se poser cette question absurde. La folie des “marques” frappe une à une les communes qui veulent se “vendre” dans la guerre économique et enrôler leurs populations dans ce conflit. Ce qui n’exclut pas, comme à Cholet, le recours aux bonnes vieilles méthodes militaristes et d’embrigadement de la jeunesse...

À Angers, la municipalité PS-Verts a depuis longtemps cultivé à grands frais le chauvinisme local pour faire valoir son insertion dans le jeu malsain de la « concurrence » et de la « guerre » (sic) entre grandes villes. En 2011, ce fut le dépôt de la marque « Angers Loire valley », l’injonction « live large » faite aux habitants d’être «  dépositaires de l’image » du territoire et la (ridicule) campagne de publicité « fiers d’être angevins ». Les slogans creux « vivre la ville » et « aimons Angers » fonderaient l’unité d’une communauté au-delà de ses (très grandes) différenciations de classes. Si de vagues préoccupations sociales ou écologiques apparaissent de temps à autre dans les discours, elles ne sont que prétexte à la légitimation d’une politique largement capitaliste et productiviste par ailleurs. Ainsi en témoignent les luxueux projets Gare+ d’hôtel de luxe et de bureaux (à la place de l’ancienne SERNAM) ou de nouveau centre des congrès (à côté du théâtre Le Quai), alors que dans le même temps régresse la proportion de logements véritablement sociaux.

Le Conseil général de l’UMP Béchu donne dans la même veine. L’autocollant « Notre marque, c’est notre territoire, l’avenir pousse en Anjou » est joint à son journal de février, dont le dossier central « L’Anjou affirme son identité » vante les « produits de l’Anjou » (marque déposée) et l’esprit d’entreprise concurrentiel. Avec ses petits moyens et dans une version encore plus provinciale, Saumur n’est pas en reste. La municipalité de droite a lancé une très dérisoire campagne de pub en début d’année pour un nouveau logo commercial de la ville. On trouve depuis sur son site un clip censé décliner son «  identité ». Y défilent, accompagnées d’une horripilante musique commerciale, quelques dates prétendument marquantes (du genre : « 1800, Saumur devient sous-préfecture ») –curieusement, la Saumur protestante et les guerres de religion sont oubliées !– et bien sûr le nouveau logo « made in Saumur »…

Mais, comme d’habitude, c’est le maire d’extrême droite (CNI) de Cholet qui cultive le plus l’étroitesse d’esprit de clocher et déploie les plus grands efforts pour laver les cerveaux. Il est vrai qu’il le fait à l’ancienne, et qu’il n’a pas encore compris que le “bon” nationalisme d’aujourd’hui est celui des marques. Le 3 février, au nom de la Communauté d’agglo choletaise (CAC), il a signé un « pacte d’amitié » (sic) avec… le sous-marin nucléaire Le Triomphant. Certes, le Choletais n’a jamais été une très grande base militaire sous-marine, ni même un port, mais, « profondément marqué par son histoire tragique liée aux Guerres de Vendée  » , il serait « attaché au devoir de mémoire ». En toute logique impénétrable, la CAC va donc donner son « son appui aux écoles, collèges ou lycées qui souhaiteront mettre en place des relations avec l’équipage du sous-marin Le Triomphant » et « les enseignants pourront valoriser ces relations selon les projets pédagogiques développés (instruction civique, histoire, hautes technologies…). » Gilles Bourdouleix invente ainsi l’union bancale de l’archéo-chouanisme et du militarisme nucléaire “républicain”. Et promeut l’embrigadement des enfants jusque dans les écoles…

Angers, Conseil général, Saumur, Cholet : au-delà de différences d’approche certaines, ces collectivités locales ont recours de façon systématique à l’esprit de clocher identitaire et/ou commercial, voire dans le cas choletais au militarisme le plus éculé. Derrière ce qui pourrait prêter à sourire ou à inquiéter, se cache une réelle tentative d’aligner les collectivités locales sur le modèle de l’entreprise capitaliste, de formater les esprits, de détourner les jeunes et la population des véritables problèmes sociaux et de démocratie. À nous de montrer qu’un autre mode de développement des collectivités est possible, fondé sur la coopération au lieu de la « concurrence », de la « compétition » et de la mesquinerie ultra-localiste !

19 février 2012, par NPA 49