Vers un plan social à l’Université d’Angers ?

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La loi LRU dite d’autonomie des universités, votée au pas de charge pendant l’été 2007 après l’arrivée de Sarkozy à la tête de l’État, n’en finit pas de pourrir le service public universitaire. Après avoir poussé les établissements à embaucher des précaires à la place de fonctionnaires, l’État les oblige maintenant à les licencier au nom de l’austérité et des économies budgétaires. À Angers, la présidence de l’université “autonome” vient de se résoudre à la suppression de 45 emplois de contractuels afin de récupérer 300.000 euros. La spirale de la logique comptable ne s’arrêtera pas là : réduction de l’offre de formation, réduction des champs disciplinaires en recherche, missions de l’université soumises aux desiderata patronaux et hausse des droits d’inscription sont déjà inscrits dans la ligne d’horizon. Il faut d’urgence abroger la loi LRU et donner au service public les moyens de fonctionner. Pour l’heure, empêchons toute suppression d’emploi !

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Dans un communiqué de presse [1] réagissant à brûle-pourpoint à l’annonce par la présidence de sa décision de supprimer 45 emplois selon une liste arrêtée par la Direction des ressources humaines de l’Université [2], les organisations syndicales établissent un lien clair entre ce plan social et la loi LRU de 2007. C’est que les dangers de cette loi dénoncés d’emblée par le mouvement étudiant et les syndicats ne cessent de se manifester depuis.

Le pouvoir sarkozyste revendique (à juste titre) cette loi LRU comme la grande “réussite” de son quinquennat. Il est en effet parvenu à faire relayer dans les établissements son entreprise de démolition du service public et de privatisation larvée de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR). Les présidents d’université, regroupés derrière la bannière d’une CPU [3] travaillée au corps par les Think tanks libéraux, ont globalement accepté une réforme qui leur donnait les pleins pouvoirs et l’illusion de devenir de véritables chefs d’entreprise. Aguichés par des primes revalorisées pour eux-mêmes et de l’argent frais pour leurs établissements, ils ont fait basculer ceux-ci vers le “budget global”, intégrant la masse salariale des fonctionnaires. Parfois, ils ont accepté la dévolution des bâtiments, en en devenant les propriétaires. Sur les exercices comptables, les zéros ont été multipliés, leur donnant l’impression grisante d’être aux manettes de grands navires voguant vers un avenir radieux.

Or, la réalité de la fin du règne sarkozyste les prend maintenant à la gorge. Les milliards du “Grand emprunt” étaient un leurre, dont seuls les intérêts vont être distribués à quelques-uns, laissant tous les autres sur le carreau. [4] Les Fondations vantées par Sarkozy-Pécresse ne seront que chichement abondées (si elles le sont !) par des capitalistes peu pressés d’y dilapider leur argent alors qu’ils exploitent déjà les laboratoires publics et le travail des chercheurs par le biais des contrats. Et le budget alloué aux universités se réduit en peau de chagrin. Des coûts insoupçonnés apparaissent : entretien et consommation des bâtiments [5], masse salariale augmentant plus vite que la dotation de l’État [6], cotisations multiples, subventions obligatoires, etc. Autant de douches froides pour les présidents qui vont devoir se comporter en vulgaires managers, puiser dans la masse salariale et licencier une partie des contractuels qu’ils avaient été obligés de recruter pour remplir les tâches administratives nouvelles confiées aux universités.

À Angers, les contractuels ne représentaient que 7-8% des effectifs non enseignants (BIATOS) [7] avant 2007. Ils en atteignent aujourd’hui autour de 40%. En supprimer 45 (par non renouvellement de leurs contrats) revient à en éliminer un sur six... Or, les besoins en personnels sont plus que réels et l’Université d’Angers est largement déficitaire en postes selon l’aveu même du ministère. C’est donc non seulement un coup dur pour ces êtres humains, mais ce l’est aussi pour ce qui reste du service public universitaire... Cette annonce de licenciements de facto est donc inacceptable.

Plus généralement, il faut d’urgence inverser la vapeur. La mobilisation contre la loi LRU doit être relancée. La titularisation sur des postes de fonctionnaires de tous les contractuels doit devenir une revendication majeure du mouvement syndical. Il faut priver les présidents du pouvoir qu’ils ont usurpé et le donner à des structures collégiales et démocratiques de tous les personnels. Au lieu de la mise en concurrence généralisée des établissements, des laboratoires et des individus et de ses effets délétères, il faut développer les coopérations à tous les niveaux et refonder un véritable service public universitaire ouvert à toutes et tous, débarrassé de la tutelle politique de l’État et financé par l’impôt, produisant et transmettant les connaissances en symbiose avec la société.

6 avril 2012, par NPA 49

[1] Communiqué des Organisations Syndicales Force Ouvrière, FSU et UNSA de l’université d’Angers :

Lors d’une réunion liée au Comité Technique, le président de l’université, M. Saint André, et le vice président au C.A ont annoncé aux organisations syndicales présentes la répartition des économies qu’ils envisageaient de mettre en place pour le budget 2012 afin de faire face à l’augmentation des dépenses de personnels et des charges immobilières non prises en compte par notre tutelle ministérielle.

Parmi ces mesures, la réduction de la masse salariale de 300.000€ votée lors d’un Conseil d’Administration précédent sous la présidence de M. Martina a été maintenu. En conséquence, pour M. le Président, cela doit se traduire par une suppression de 45 emplois de contractuels à la fin aout. Ces postes sont d’ores et déjà identifiés, mais la liste pourrait être modifiée en fonction des retours des composantes.

Nous ne pouvons accepter que les salariés quels qu’ils soient fassent les frais de la loi LRU et de la politique d’austérité mise en place par l’État.

Le président lorsqu’il était candidat évoquait déjà une suppression de 10 à 15 postes sur des appels à projet. Il justifie maintenant le triplement de ce chiffre par le fait que cela n’était valable que sur une année pleine et non sur la période de septembre à décembre 2012. Pourtant, cela était déjà prévisible à l’époque. Aujourd’hui, même des postes dit "pérennes" seraient touchés et dans certains cas avec des personnels entrant en procédure concertée en 2012 (plus de 3 ans d’ancienneté).

Ce tour de passe-passe conduirait en fait à une économie sur le dos des salariés de 900.000€ en année pleine pour 2013 et les années suivantes.

Nous refusons cette logique purement comptable qui réduit les personnels à des variables d’ajustement. Des êtres humains et des familles seraient touchés si ce plan de suppression d’emploi était confirmé.

Il faut rappeler que selon les chiffres fournis par le ministère, il manque 300 emplois de titulaires à l’université d’Angers pour être dans la moyenne nationale. L’embauche des CDD ces dernières années correspond ait à de véritables besoins.

Ce qui est annoncé aujourd’hui est la conséquence directe de la loi LRU (dite d’autonomie des universités) qui a obligé les universités à créer des emplois précaires en décentralisant des taches administratives sans fournir les moyens en contrepartie.

Nous ne sommes pas en sureffectif !

Aussi les Organisations Syndicales refusent ce plan de suppressions d’emploi et ont demandé une entrevue à la présidence pour exiger la recherche d’autres solutions. Nous vous tiendrons informés de la réponse.

FSU, UNSA, Snpress-FO.

P.S. : Les autres mesures envisagées par la présidence concernant l’emploi :
-  des mutualisations,
-  le non recrutement sur des emplois libérés par des concours en 2012,
-  le non recrutement sur des emplois titulaires vacants en 2012.

[2] Cette liste est toutefois susceptible d’être modifiée à la marge après consultation avec les différentes facultés, instituts ou écoles

[3] Conférence des présidents d’universités

[4] C’est le cas de toutes les universités de l’Ouest, qui ne bénéficient que rarement des projets dits d’excellence : quelques "Labex" et "Equipex" par exception, aucun "Idex"...

[5] C’est ainsi que le coût de fonctionnement du nouveau bâtiment IRIS en faculté de médecine s’élèverait à 600.000 euros/an au lieu des 250.000 estimés avant sa construction...

[6] En particulier à cause du fameux GVT ou glissement vieillesse traitement. En vieillissant le fonctionnaire gravit automatiquement des échelons et son salaire augmente. Rien de dramatique si les salaires élevés sont remplacés par les salaires bas des plus jeunes au fur et à mesure que les plus vieux partent en retraite. Mais ce GVT fait augmenter la masse salariale si la population salariée vieillit. C’est ce qui se passe lorsque les établissements ne recrutent plus de jeunes...

[7] BIATOS=Bibliothécaires, Ingénieurs, Administratifs et Ouvriers de service